Le Corbeau et la Corneille sont parfois confondus dans les anciennes représentations mythologiques et artistiques. Ils symbolisent l'Intelligence, la Clairvoyance, aussi la Mort et la Guerre puisque ce sont des animaux des Champs de Batailles, se nourrisant de la chair des défunts. D'ailleurs le Corbeau est un combattant qui n'hésite pas à s'attaquer aux rapaces qui osent s'aventurer sur son territoire comme les Buses. Dans l'Antiquité ils étaient des messagers des Dieux, faisant régulièrement le trajet entre les mondes des divinités, des vivants et des morts, d'où leur savoir et leur pouvoir de prophétie. En effet, les Corvidés suivent le Soleil dans sa course quotidienne, jusqu'en Enfer lorsqu'il se couche. Il s'agit donc d'animaux à la fois Célestes et Chtoniens, Solaires et Ténébreux, Guerriers et Savants.
Ils accompagnent les divinités de la Mort comme Sucellos, Nantosuelta ou de la Guerre telles Totatus, Cathubodua (dont le nom signifie Corneille de Bataille), ainsi que les divinités solaires liées au savoir et à la prophétie, dont Lug et Maponnos. Certains auteurs antiques rapportent que plusieurs tribus de cultures Barbares dont des Celto-Nordiques ne réclamaient pas les corps de leurs camarades tombés au combat et laissaient sciemment les oiseaux charognards les manger, afin que ces messagers divins transportent les âmes des valeureux guerriers auprès des Dieux Célestes.
Un des termes Celtiques servant à dédigner le Corbeau serait "Lugos" issu de l'Indo-Européen "Leug" signifiant "Noir", tandis que Lumière se dirait "Lug", de même racine que "Luce" en Latin. On a encore cette ambiguité Clarté/Ténèbres dans l'étymologie même. On retrouve des toponymies à base de Lug dans toute l'Europe, en effet, plusieurs villes ont été fondées sur des emplacements indiqués par des Corbeaux et/ou en l'honneur du Dieu Lug, comme Lug Dunon (actuelle Lyon). Selon la légende, le Druide Momoros et le Roi Atepomaros cherchaient un emplacement pour fonder une cité et tracèrent un grand cercle au sol qui représentait le futur mur d'enceinte. Une fois cette tâche accomplie, une nuée de Corbeaux se posa sur une colline située dans la limite fraîchement matérialisée, ce qui fut interprété comme une bénédiction du Dieu Lug, d'où le nom de Lug Dunon, signifiant Colline aux Corbeaux ou Forteresse de Lug. Il se peut même que la hauteur en question soit celle où se trouve aujoud'hui la Basilique de Fourvière. En Auvergne, c'est peut-être aussi le cas de Lugarde (Cantal) par exemple, et des autres cités de Lug partout en Europe, qui sait?
Le Corbeau et la Corneille se retrouvaient souvent sur des enseignes guerrières et des casques des Celtes ainsi que d'autres peuples Nordiques. Mais le plumage noir et la nécrophagie du Corvidé ne sont pas du goût des Chrétiens qui ont pris le pouvoir, ce qui a contribué à assombrir la réputation de l'animal. Dans la Culture Occidentale moderne, il se retrouve avec un rôle ambigu: d'un côté son rapport à la Mort le lie au malheur, cet "Oiseau de Mauvais Augure", de l'autre il est toujours perçu comme un être rusé et proche des humains. Autrefois omniprésent en Europe pour son symbolisme fort, on ne le retrouve, lui ou la Corneille, que de manière anecdotique sur quelques blasons, l'Aigle, animal céleste et impérial cruel, lui étant largement préféré. Ci-contre le blason de la famille Villaret, Nobles du Gévaudan: D'or, à trois monts de gueules surmontés chacun d'une Corneille de sable.
Article liés : Corbeau (Nature) - Légende des Corbeaux dénonciateurs de Champétières - Dieu Lug
Commentaires
Tu écris : "Un des termes Celtiques servant à dédigner le Corbeau serait "Lugos" issu de l'Indo-Européen "Leug" signifiant "Noir", tandis que Lumière se dirait "Lug", de même racine que "Luce" en Latin. On a encore cette ambiguité Clarté/Ténèbres dans l'étymologie même."
Il faut savoir que dans Belenos/Abellion/Apelon/Apollon, la racine *bel renvoie fortement vers le Noir, comme la variante dane Hell, grec Helios. On tire vers les Urworten, les mots originaires, qui comprenaient souvent des ambiguïtés. Mais les Celtes aimaient les jeux de mot, et que Lug vienne de Lumière ou d'Obscurité, à la fin, c'est pourtant la même chose, qu'importe l'étymologie. L'Obscur est le numen de fond depuis lequel peut poindre et jaillir la Lumière, la voie à suivre est alors celle du dioscure/jumeau divin Ogmios, bien qu'on disait bien Lug "dieu aux corbeaux", influençant Odin s'il ne suscite pas son émergence dane (Tyr tenant antiquement le haut du pavé dane) puis advenant Merlin (celto-chrétien) : http://antiqueaquitaine.canalblog.com/archives/2020/06/28/38398644.html - autant de figure associées à l'Obscurité autant que la Lumière.
C'est toute l'influence saturnienne des Ibères, depuis un fond Africain-du-Nord et Oriental archaïque.
Bien à toi
Explication éclairant, merci ! Ça semble logique avec ce point de vue. Il est clair qu'à l'origine la Nuit, l'Au-delà/Royaume souterrain, la Mort... Tout cela n'avait pas la connotation négative que ça a maintenant, chez les Indo-Européens en tous cas. J'ose imaginer que ça l'était déjà au Néolithique ?
Au sujet de Tyr, c'est souvent que je vois qu'il était effectivement la Dieu Souverain avant Odin. Mais j'ai été surpris de voir que tous les Nordisants ne le sachent pas forcément.
Oui.
Attention : parmi les Indo-Européens dont tu parles, il y a les Romains, qui n'aiment pas beaucoup le monde inférieur, tandis que les Grecs en font un lieu d'ennui. Quant aux Nordiques, ce qu'on sait d'eux ne plaide pas non plus pour une valorisation des enfers, entre ennui des morts au Helheim et dangerosité des autres mondes inférieurs, notoirement au Ragnarok. Ils ont subi de lourdes influences monothéistes, mais il est permis de dire que les Indo-Européens valorisent avant tout les Cieux.
Les Celtes, influencés par le vieux fond millénaire dont je parle, venu d'Anatolie avant les Indo-Européens (Yamnayas) sont en quelque sorte des Indo-Européens avant l'heure, et qui ont continué d'échanger avec l'Afrique du Nord et l'Orient évidemment à travers la Méditerranée à l'ère celtique (on voit bien, par exemple, que les Grecs intègrent "un dieu asiatique" nommé Dionysos qu'ils font fils de Zeus, et que les Romains intègrent Mithra, dieu-taureau typique des Perses).
Les Celtes sont un tel mélange de confluences, originalement, entre Ibères anatoliens et descendants des Yamnayas.
PS: pour être précis, une culture originale en Europe atlantique, du coup.