La Contre-Révolution dans le Massif Central n’est pas aussi intense que dans l'Ouest de la France, pourtant plusieurs épisodes particulièrement traumatisants pour les Révolutionnaires d’Auvergne vont leur faire craindre l’apparition d’une Deuxième Vendée, certains n’hésitant pas à parler de Chouanneries. Si vous ne connaissez pas le contexte de la période révolutionnaire ni ce qui peut pousser autant de gens à se rebeller contre le nouveau régime démocratique, je vous invite à lire la page dédiée à la Révolution Française vue de l'Auvergne.
On désigne par Contre-Révolution l'ensemble des idées et actions qui vont à l'encontre de la politique progressivement mise en place en France à partir de 1789.
Ce terme amalgame en fait des réalités très différentes, qui peuvent être politiques, religieuses ou sociales. En effet on trouve les Royalistes (souvent absolutistes), qui estiment que l'Ancien Régime était mieux, les Monarchistes Constitutionnels, qui aimeraient tenter un autre type de Royaume Démocratique que celui qui a échoué sous Louis XVI, les Catholiques qui voudraient pratiquer à nouveau leur culte, des déserteurs/des réfractaires à la Conscription qui ne souhaitent pas/plus servir de chair à canon pour la République, et diverses personnes de toutes origines sociales, y compris paysanne, qui sont déçues par toutes les promesses non tenues et/ou ont tout perdu à cause de la crise économique ou des troubles Révolutionnaires. À ceux-là viennent parfois se greffer des hors-la-loi et brigands de toutes sortes, ce qui fait que la Garde Nationale va affronter des groupes très hétéroclites.
Au début de la Révolution
Les réseaux Contre-Révolutionnaires Auvergnats débutent dès 1789, en contact avec ceux du Dauphiné, du Lyonnais et des Provinces du Midi, ainsi qu'avec les Emigrés Royalistes. Plusieurs groupes sont infiltrés et démantelés par les Amis de la Constitutions (Partisans de la Révolution), plusieurs personnes sont arrêtées, une partie des rescapés vont alors émigrer pour se mettre à l'abri des représailles. Des activités clandestines sur les limites provinciales puis départementales sont mis en en place par les Contre-Révolutionnaires, de l'Auvergne jusqu'au Lyonnais et dans le Gard. Un intense trafic d'armes et de chevaux se développe sur la frontière du Velay. Des rachats et des vols de Biens Nationaux sont commis dont une partie est restituée à leurs anciens propriétaires. Ils veulent également prendre le contrôle des routes qui relient le Midi et la Capitale.
En 1790 les Gardes Nationaux d'Effiat, exaspérés par les nouvelles des exactions des Révolutionnaires et de la situation de quasi-guerre civile de Paris, piétinent leurs Cocardes Tricolores et se désolidarisent des mouvements démocratiques qu'ils avaient initialement rejoints. Dans plusieurs communes, des foules de femmes se pressent devant les hôtels de ville pour dénoncer la hausse constante du prix du pain et réclament le retour des Princes, ce qui attire la Garde Nationale qui doit affronter une partie de la population. On accuse ces protestataires d'avoir été soudoyées par les Royalistes pour créer ces troubles à l'ordre public. En Décembre 1790, environ 200 Auvergnats quittent leur région avec des noms d'emprunts pour rejoindre les Royalistes de Lyon et leur prêter main-forte contre la répression Révolutionnaire. Plusieurs personnalités y perdront la vie comme Frédéric Amable du Ligondès et Alexis d’Espinchal, se faisant tuer en 1798 et 1799.
La Coalition d'Auvergne est créée à Fribourg en Avril 1791, signée par des Royalistes des 4 départements, se réclamant du 
même combat que le Prince de Bourbon-Condé et le Comte d'Artois (futur Charles X) qui exigent le retour de la Religion Catholique Romaine et de l'autorité du Roi. Elle est est suivie par beaucoup d'Officiers en début de carrière, ainsi que nombre d'anciens élèves de l'Ecole Royale Militaire d'Effiat. Elle aura des ramifications dans le Midi et le Sud-Ouest du Royaume. Le nombre d'acteurs actifs est faible, mais ils sont activements soutenus par une petite frange de la population.
L'Armée de Condé, dite aussi Armée des Princes ou Armée des Emigrés, est comme son nom l'indique une troupe composée d'environ 20000, principalement des Nobles et des Militaires, dont des anciens élèves d'Effiat, ayant fui la France durant la Révolution Française. Elle dirigée par Louis V Joseph Bourbon-Condé, qui est un Prince de Sang. Leur but est de combattre la Révolution depuis l'étranger en participant militairement aux campagnes des Monarchies Européennes contre la France. Ils veulent aussi s'assurer que le pays ne sera pas partagé entre les futurs vainqueurs et que lors de la Restauration on mette bien sur le Trône une Dynastie Française.
Le refus de la Constitution Civile du Clergé en 1790 par de nombreux Prêtres (les Réfractaires) va grossir considérablement grossir les rangs Contre-Révolutionnaires. Ils construisent leurs propres réseaux, en correspondance avec l'ancien Evêque de Clermont François de Bonal, l'ancien Evêque du Puy Marie Joseph de Galard, exilés en Suisse, ainsi que d'autres personnalités. Ils déclarent que les élections départementales des Clercs ainsi que le serment sur la Consitution sont illicites, et on qu'on ne peut remplacer l'autorité des anciens Evêques. Ils interdisent donc aux Prêtres de prêter le serment. Les Révolutionnaires les surnomment le Parti Noir, à cause de leurs soutanes. Ils vont se mettre plus tard en contact avec la Coalition d'Auvergne, afin de leur faire bénéficier de leur réseau. L'ex-Evêque de Clermont, François de Bonal, leur envoie de la fausse monnaie depuis la Suisse.
Les anticonstitutionnels sont particulièrement actifs dans beaucoup de communes. Par exemple le Curé de Courpières, un Réfractaire, de fait considéré comme démissionnaire par les autorités départementales, s'organise avec ses fidèles afin de continuer à célébrer sa messe habituelle en même temps que le nouveau Prêtre Jureur, et ainsi lui signaler sans violence qu'il n'est pas le bienvenu et ne sera jamais reconnu par les habitants de sa commune. D'autres Clercs comme celui de Mozat, François Bergougnioux, prêchent contre la Constitution et appellent à la désobéissance civile, insultant et condamnant les Révolutionnaires à la damnation éternelle, ce qui leur vaut souvent une amende ou la prison. L'Eglise de Mozac sera détruite en représaille comme symbole du fanatisme.
Beaucoup de Prêtres Réfractaires organisent des messes clandestines : Jean-Baptiste Quesne officie dans environ une dizaine de bourgs de Billom à Champeix. Ces Curés professent l'excommunication des Républicains et des Prêtres Jureurs, annonçant la vengeance de Dieu et le retour d'un Roi. A Saugues le Prêtre Réfractaire est arrêté et remplacé par un Jureur. Les Croyants l'accueillent avec des insultes et un drap mortuaire. Dans le Velay, ce sont les Fidèles qui volent les clefs de leurs Eglises pour empêcher les Constitutionnels d'assurer leurs messes comme à Saint-Germain La Prade ou à Yssingeaux.
Dans la commune des Estables, le Prêtre Jureur se trouve fort agacé de se trouver tous les Dimanches tout seul dans son Eglise vide, et en fait le reproche aux paroissiens. Le Dimanche suivant, quand il ouvre les portes de l’Eglise, il la découvre remplie de porcs, et les villageois se moquent de lui, disant qu’ils lui avaient trouvé des paroissiens dignes de lui. Il portera plainte contre eux. Dans toute l'Auvergne des Constitutionnels se font injurer et parfois attaquer au bâton ou aux jets de pierres.
Pendant ce temps la crise économique s'intensifie, le manque de nourriture n'est toujours pas résolu et de plus en plus de gens ne peuvent ni ne veulent payer l'impôt. Les persécutions de Prêtres Réfractaires rajoutent encore à cette tension, le tout déclenchant des émeutes et des pillages dans beaucoup de communes comme Pontaumur, Lempdes, Billom, Cournon, Les Martres-de-Veyre, Pont-du-Château, Ardes, Beauregard-l’Evêque, Ambert, et on entend des rumeurs de soulèvement à Maringues, Vic-le-Comte ou Saint-Flour.
Les Contre-Révolutionnaires espèrent que les Emigrés de l'Armée de Condé reviendront vite ou que les autres Monarchies leur porteront secours, mais pour le moment rien ne se passe. De plus, beaucoup des Royalistes encore présents en Auvergne sont des Nobles et des Clercs, représentants des anciens Ordres privilégiés. Ils peinent à rallier à eux le reste de la population qui, malgré qu'elle soit de plus en plus sceptique face à la Révolution, ne réclame pas majoritairement le retour de l'Ancien Régime, loin de là ! Les anciens élèves Effiatois qui servent dans l’Armée Royale écrivent une lettre à Louis XVI en Janvier 1792 pour exprimer leur mécontentement au sujet de la politique de l’Assemblée Constituante et leur volonté de démissionner (beaucoup rejoindront l’Armée de Condé) : Tant que nous avons eu l’espoir de contribuer à inspirer un bon esprit et l’amour de votre personne sacrée aux cavaliers du régiment de Royal-Guyenne de votre Majesté, nous avons cru la servir utilement en restant à nos places. Cette idée a été le seul guide de notre conduite, nous avons vaincu notre répugnance pour le serment à l’époque de sa prestation. En cela, Sire, nous avons fait à votre Majesté un des plus grands sacrifices possibles, en compromettant dans l’opinion publique l’apparence de nos sentiments et de notre délicatesse. Nous espérons, Sire, que votre cœur approuve les motifs de notre démarche. L’honneur et la délicatesse nous ordonnent impérativement de quitter, et d’adresser à votre Majesté la démission de nos emplois qui, si nous les gardons plus longtemps, nous forceraient d’agir contre son vœu sincère et contre vos véritables intérêts. En priant votre Majesté de vouloir bien l’accepter, nous osons la supplier instamment d’être persuadée de notre dévouement pour sa personne sacrée et son auguste famille. Nous désirons instamment, Sire, de trouver l’occasion de le prouver à votre Majesté, fusse au dépens de notre vie. (Source : la Basse-Auvergne, une seconde Vendée ? Ecrit par Philippe Bourdin)
Résistance populaire contre la République
Ce n'est que plus tard que la Contre-Révolution va prendre de l'ampleur, dans le courant 1792-1793 avec la décapitation du Roi, la violente Déchristianisation du pays et la politique de Terreur qui vont profondément écœurer une grosse partie des Citoyens. De plus, les Monarchies voisines voient dans ce Régicide une provocation a leur encontre, et déclarent la guerre à la France avec l'appui des Emigrés. Trop peu de volontaires Français s'engagent pour défendre la Patrie, le nouveau Gouvernement a donc recours à la Levée en Masse ou Conscription des hommes, c'est-à-dire que des agents entrent dans les communes, tirent au sort des noms de Citoyens locaux et ces derniers seront alors envoyés sur les champs de bataille pour remplacer les Nobles et militaires qui ont fuis le pays ou ont été guillotinés. Beaucoup de gens ne veulent pas partir à la guerre risquer leur peau pour ce nouveau régime hérétique, meurtrier et pas plus compétent que le précédent à résoudre la crise économique et la famine. C'est pourquoi dans beaucoup de communes des hommes vont s'en prendre physiquement aux agents lors des tirages au sort, en criant «Vive le Roi ! Vive le Dauphin ! Merde à la République ! Au foutre la "Nation" !» La Garde Nationale tire sur les émeutiers. Ce genre de troubles arrive par exemple à Vollore-Montagne, La Tour, Saint-Pardoux, Billom, Aubière, Cébazat, les Martres d'Artières, Veyre-Monton, Ambert, Thiers, ou Aigueperse. Quand il n'y a pas de Gardes dans un village pour protéger les agents, la Conscription est repoussée de plusieurs jours le temps de faire venir des troupes armées. Les Catholiques réclament la réparation des clochers et la restitution des Eglises et de leurs cloches.
A Vollore, le 13 Mars 1793 a lieue une insurrection armée d'environ 600 personnes contre les Révolutionnaires. 2 jours plus tard, la Garde Nationale rejoint la ville pour les affronter. Mais la bataille est serrée, Thiers doit envoyer des renforts, tandis que les Contre-Révolutionnaires recrutent de leur côté dans les communes voisines et ce jusqu'à Ambert, Aubusson et Billom, parfois par la force et la boisson. Ils seront finalement défaits par les Républicains.
Dans le Nord du Livradois-Forez, un groupe organisé de plus de 500 personnes va agiter une partie des communes contre les Républicains à partir du 16 Mars 1793, arrivant même à faire annuler les enrôlements à Cunlhat, Tours-sur-Meymont et Ceilhoux. Ils entonnent des chants Royalistes et réquisitionnent des vivres ainsi que des munitions chez les habitants. Mais cela sera de courte durée puisque la Garde Nationale est envoyée le 18 Mars et arrive à disperser les rebelles. On note les mêmes genre de troubles dans presque toute l'Auvergne, dans tout le Massif Central et dans plusieurs départements limitrophes.
En Décembre 1793 les délégués de la commune de la Roche-Blanche dont dépend Mardogne (actuelle Gergovie) se rendent à l'Eglise du lieu et demandent au Curé Rouzet de la leur ouvrir. Ils commencent à répertorier et ramasser les objets de valeur. Les habitants du hameaux se rassemblent tous et les insultent, puis finissent par les attaquer ! Les communaux sont obligés de fuir pour ne pas être lynchés, Maignet envoie alors dans le village la Garde Nationale pour rétablir l'ordre et capturer les meneurs des émeutiers.
Les Contre-Révolutionnaires volent des cloches des Eglises et les cachent pour éviter qu'elles soient fondues comme à Rozières.
Autour de Montaigut, où se trouvait un Prêtre Constitutionnel de la 1ère heure, les Paysans Républicains dénoncent une partie des Nobles locaux qui selon eux entretiendraient à leurs frais des groupes de Royalistes.
On observe souvent des dénonciations politiques sur fond de querelles de voisinage entre Citoyens. Exemple : à Saint-Amant-Tallende des villageois se plaignent de Georges Gourdon, un vigneron qui, d'après eux, chanterait fort bruyamment des insanités contre la République, mais après enquête on se rend compte que ce dernier était déjà en conflit physique et judiciaire avec les plaignants. On ne sait pas s'il proférait vraiment des insultes contre le nouveau régime, mais c'était le prétexte idéal pour le faire soupçonner par les autorités.
Des populations de villages plutôt Royalistes affrontent parfois les villages Républicains proches comme dans le canton de Saint-Gervais, où au terme des combats les Contre-Révolutionnaires finissent par contrôler tous les villages et hameaux alentours. Même parmi les agents municipaux de certaines commune on trouve des déçus de la Démocratie. Ceux de Cunlhat seront suspendus par la République en Janvier 1793 pour n'avoir pas complètement déchristianisé la ville, pour avoir gêné le Prêtre Jureur local dans ses fonctions, pour avoir déconseillé aux habitants de joindre la Garde Nationale ou l'Armée, pour avoir empêché la publication et l'affichage de certains écrits Patriotiques.
Plusieurs Nobles encouragent ces mouvements de rébellion, mettant à disposition des insurgés leurs demeures, des armes et de l'alcool. Parmi eux, Jacques-Christophe Micolon de Guérines, Alexis Bertrand de Provenchères, Guillaume Coiffier de Terraules qui lui sera arrêté et guillotiné à Lyon. Ces Aristocrates ne participent pas tous aux affrontements, mais il arrive que l'on y retrouve leurs domestiques parmi les meneurs. On trouve aussi des Séminaristes et beaucoup de Paysans Catholiques. Les Contre-Révolutionnaires qui sont traqués profitent du relief du Massif Central pour échapper à la Garde Nationale, beaucoup s'abritent dans les bois des Combrailles et du Livradois.
Au début, les Républicains pensent qu'il s'agit d'actes isolés, et que la plupart des constestataires sont juste des réfractaires à la Conscription. Pourtant, la multiplication des incidents et la régularité des slogans Royalistes inquiètent rapidement les autorités, se demandant s'ils ne pourraient pas se retrouvet face à une 2ème Vendée s'ils ne réagissent pas très vite. On rapporte régulièrement des propos comme :
«puisqu'il n'y avoit plus de Roy, il ne falloit plus tirer»;
«je ne voulois pas me battre contre la religion»;
«je me mobiliserai quand il y aura à nouveau un Roy, mais il ne falloit tirer ni partir pour la canaille»...
Les Bleus sont quasi-quotidiennement menacés de purge et de décapitation. Un peu partout, des Républicains sont assassinés. Durant cette période, la propagande antirépublicaine s'intensifie, les autorités interceptant souvent des lettres ou des affiches incitant les Citoyens à désobéir à la République. Par exemple, Aux Français, lettre interceptée en 1793 : Français, verrez-vous toujours d’un œil tranquille et indifférent votre patrie en proie à la fureur d’une troupe de scélérats qui ont juré de faire un vaste tombeau du royaume cy-devant le plus florissant de l’Europe ? Quoi ! Préservez-vous toujours de joindre vos forces à celles de ces hommes cruels et qui ne respirent que le sang.
Dans les régions alentours la tension monte également, on peut citer le Camp de Jalès dans le Gard avec le Comte de Saillans en 1792, où les Catholiques sont en conflits avec les Républicains et les Protestants de la zone. Il y a aussi la Lozère où les volontés Contre-Révolutionnaires s'affichent fortement depuis au moins 1791, qui culmineront en 1793 avec Marc-Antoine Charrier et l'Abbé Claude Allier qui mèneront l'Insurrection du Gévaudan. Avec leur Armée Chrétienne du Midi ils arriveront à prendre plusieurs villes, mais face à leur évidente infériorité numérique, ils renverront leurs hommes et abandonneront la lutte. Marc-Antoine Charrier sera guillotiné mais Châteauneuf-Randon permettra à sa femme de partir.
Il y aussi le village de Chevrières et ses environs, dans le Forez, où environ 2000 personnes recherchées par la République trouvent refuge. Là, un fermier aisé nommé Antoine Croizier, surnommé le Roi de Chevrières, dirige une milice locale depuis 1793 et affronte régulièrement les troupes Républicaines. Cette bande est tellement efficace que la plupart des lois antichrétiennes ne s'appliqueront pas sur leur territoire qui est surnommé la Petite Vendée. Ils ne seront finalement défaits qu'en 1798, par des soldats recrutés dans tout le département de la Loire par la Convention.
La Terreur Blanche
La Chute de Robespierre et de Couthon en 1794 va complètement désorganiser les structures Républicaines, dont les partisans sont divisés, laissant beaucoup plus de marge aux Royalistes. La Terreur n'est plus, et les Contre-Révolutionnaires vont activement recruter parmi les familles de victimes qui désirent se venger. Les groupes les plus connus sont :
- les Compagnons de Jéhu, groupe Royaliste violent qui organise la vengeance contre les Républicains à Lyon et auront des activités jusqu'en Haute-Loire et dans le Midi. C'est une référence Biblique à Jéhu, qui rétablit le Trône d'Israël et la Foi en Dieu contre les Païens du Dieu Baal ;
- la Compagnie de la Ganse Blanche, nommés ainsi parce qu'ils portent un chapeau avec une ruban blanc disposé en forme de croix de Saint-André. Elle est formée en 1795 à Chevrières dans le Forez par François de la Motte, et agi principalement dans le Velay ;
- les Muscadins, qui ne sont pas un organisme mais un sobriquet désignant les jeunes gens issus de familles aisées ayant 
refusés la Levée en Masse et vont régulièrement se battre contre les Républicains, faisant la chasse aux Sans-Culottes, souvent armés de gourdins, parfois de sabres ou d'armes à feu. On les reconnaît facilement à leurs vêtements chics, leurs cheveux en cadenette et leur ganse blanche. Ils traînent souvent en bande.
A partir de 1795 sévit la Terreur Blanche, perpétrée par les Compagnies de Jéhu à Lyon, Toulouse, avant de s'étendre dans une bonne partie du Sud-Est de la France, au Forez et au Velay, qui va inspirer le reste du Massif Central. La Terreur Blanche est en quelques sortes la réaction à la Terreur Républicaine : des Royalistes vont s'en prendre aux Révolutionnaires et à leurs symboles physiquement, allant souvent jusqu'au meurtre et l'assassinat collectif. Les contacts entre les Compagnons de Jéhu Lyonnais et Clermont s'organisent via le Velay. En Auvergne, surtout dans le Livradois, et dans le Forez les Compagnons de la Ganse Blanche sont très actifs, commettant vols et violences sur les Révolutionnaires. Le Jacobin Maignet, dont la famille était originaire de Novacelles, malgré tout l'appui dont il bénéficiait à Ambert, vint se réfugier dans les bois du Monter de Saint-Bonnet car il craignait pour sa vie. Là, il avait une maison achetée sur d'anciens biens nationaux. Des Arbres de la Liberté sont vandalisés ou arrachés un peu partout dans le Puy-de-Dôme. Des Emigrés commencent à rentrer en Auvergne, dont des anciens élèves Effiatois ayant servi dans l'Armée Française ou dans l'Armée de Condé, parfois en plein jour et se balladent à la vue de tous, insolemment comme dirait le député Gaultier de Biauzat. Les agents du district de Thiers s'inquiètent que les chants Royalistes, les appels à la désobéissance, les dénonciations de Citoyens Républicains et les expéditions punitives contre eux se multiplient. Il arrive que cela dégénère en assassinats, enlèvements et demandes de rançons. Dans les rues de Clermont, de Thiers, de Riom, de Sauxillanges et d'autres villes ont lieues des mascarades souvent nocturnes antirépublicaines, effectuées par des groupes de personnes armées de gourdins, qui effacent ou gribouillent les dessins (graffitis) Révolutionnaires qu'ils voient.
Durant les élections de 1794-1795, à Olby, Monton, Clermont, Besse, Saint-Pardoux, Saint-Amant-Roche-Savine et d'autres communes, des partis ouvertement Royalistes s'expriment, réclamant le retour du Calendrier Grégorien, des Prêtres et du Roi. Ces Blancs arrivent à placer les leurs parmi les Grands-Electeurs, dans la justice et à faire des listes avec des Prêtres Réfractaires, des anciens Emigrés et des Aristocrates libérés ou rescapés de la Terreur. Ils arrivent aussi à recruter parmi l'administration des villes, les fonctionnaires, les magistrats, les militaires dont une partie était en place depuis l'Ancien Régime mais avait suffisamment travaillé pour la Révolution (par idéologie ou par intérêt) pour ne pas être purgés, mais n'attendent plus rien de la République qui les a déçu. Ils développent des contacts avec Paris, Lyon, et même la Vendée.
Des Prêtres recrutent les réfractaires à la Conscription ou les déserteurs de l'Armée Républicaine pour la Contre-Révolution, tel que l'Abbé Mathias à Egliseneuve. Les Royalistes lancent des rumeurs dans tout le Massif Central comme quoi les Républicains s'apprêteraient à recruter de force tous les hommes de 25-35 ans pour les envoyer au front. Ils diffusent le Manifeste de Charette (Général des Royalistes de Vendée), promettent le retour du Catholicisme et de l'abondance au nom de Louis XVIII. Les écrits des autorités Révolutionnaires montrent que les faux bruits comme les documents sont les mêmes dans toute la France et qu'ils se diffusent partout au même moment, ils pensent donc que tous les réseaux Royalistes doivent dépendre des mêmes propagandistes. Ce qui est sûr c'est que c'est très efficace, puisque cela contribue à faire basculer de larges franges de la population dans les opinions antirépublicaines, même les parents d'élèves. En effet, on accuse les Prêtres de pousser les mères de familles à refuser de mettre leurs enfants à l'Ecole Républicaine, qu'elles appellent désormais l'Ecole du Diable, où l'on blasphémerait la religion, entre autres! Les autorités pressent leur hiérarchie de prendre des mesures au plus vite pour contrer ces Fanatiques.
On a aussi des cas un peu plus spéciaux comme Antoinette Perrin, du village de Durmignat, qui se dit Prophétesse et réincarnation de Sainte-Anne. Parfois sous transe, elle exorcise les foules et les encourage à revenir au vrai Catholicisme en abjurant les idôles de la Révolution. Elle sera arrêtée en 1798 pour rébellion et sorcellerie.
Des vols surviennent souvent dans les magasins d'armes à Clermont et d'autres villes, tout le monde s'arme partout! A Craponne-sur-Arzone et d'autres villes de la Haute-Loire les Compagnons de la Ganse Blanche pillent les dépôts de munitions des Républicains. Les Contre-Révolutionnaires arrivent à contrôler de larges territoires pendant de courtes périodes, comme la troupe de Chardon des Roys qui contrôle la portion entre l'Auvergne et la Marche, ou Bonnevie dit Bras de Fer qui sévit entre Riom et Gannat, menace régulièrement la République, réquisitionne et fait des demandes de rançons...
Aux frontières de la Haute-Loire, on trouve le Comte François-Dominique Cavey de Lamothe, avec sa Compagnie de la Ganse Blanche, troupe d'une soixantaine de personnes, composée de Prêtres Réfractaires, de cultivateurs ruinés par les réquisitions, de survivants du Camp de Jalès, de Comtes et baillis du Livradois. Ils vivotent en construisant des cabanes, leurs provisions viennent de ce qu'ils volent aux Républicains ou ce que leur donnent les gens, possède aussi un petit troupeau et une basse-cour. Ils recrutent au grand jour sur les places des villages, proposant une solde et des promotions de type militaire. Ils assassinent des Républicains, harcèlent leurs troupes, dégradent leurs symboles et libèrent les prisonniers politiques.
Ils ont pour projet de reprendre le Puy-en-Velay, pour arriver à cette fin ils créent le Camp de Pertuis, dans la commune du même nom, près d'Yssingeaux. Ils y rassemblent le plus d'alliés possible et leur donnent une formation quasi-militaire. Chaque jour on y célèbre la messe en plein air. Ce Camp est surnommé Petite Vendée (comme à Chevrière dans le Forez). Les Républicains l'attaquent plusieurs fois, sans succès. Pourtant il ne tiendra pas le temps et finira par se disperser.
Lamothe se fera finalement capturer à La Narce. Aux alentours de 1797-1798, sa bande se réunis avec d'autres venues de Corrèze, Creuse, Loire, Haute-Loire pour tenter de le faire sortir de la prison du Puy, mais l'attaque échoue et Lamothe est tué à coup de baïonnettes par les gardes.
Les actions de type guérilla réussissent assez bien dans les paysages et hameaux d'Auvergne, de même les Contre-Révolutionnaires arrivent à mettre à sac quelques bourgs. Toutefois il est plus difficile pour eux de tenir en terrain découvert, et échouent plusieurs fois dans leurs tentatives de prendre des villes plus importantes comme le Puy ou Craponne-sur-Arzon en 1795. Joseph Bouillonnet de Lavillatte, qui assurait la communication entre les Contre-Révolutionnaires de Clermont et de Lyon, est arrêté et emprisonné. Il s'évade de sa geôle Clermontoise en échangeant sa place avec son fils lors d'une visite, à la barbe des gardes qui n'y voient que du feu.
En 1795 à Quiberon en Bretagne a lieu un débarquement des Anglais, appuyés par des Royalistes dont plusieurs Nobles Auvergnats qui y perdront la vie. Cette tentative sera un échec.
Ci-dessous une carte extraite de La Basse-Auvergne, une seconde Vendée ? Ecrit par Philippe Bourdin et disponible sur persee.fr qui liste et localise les diverses actions et attentats commis par les Contre-Révolutionnaires contre la République dans le Puy-de-Dôme entre Octobre 1795 et Décembre 1797 :
1796 les Royalistes créent l'Institut Philanthropique, association leur permettant de se réunir au grand jour mais qui servira à masquer leurs activités politiques. Ils publient régulièrement des papiers antirépublicains, notamment contre Claude Alexis Mabru, ami de Couthon, partisan de Maximilien de Robespierre et Maire de Clermont-Ferrand en 1798, son berceau familial se situe à Saint-Sauves-d'Auvergne. Tellement dénoncé dans des pamphlets par les Royalistes de l'Institut pour son implication dans la Terreur dans le Puy-de-Dôme que sa maison et sa fortune sont pillées par la population.
On dénonce la hausse de l'impôt, les réquisitions, la conscription et on promet aux acheteurs de Biens Nationaux qu'ils ne seront pas frustrés de leurs acquisitions quand la Royauté reviendra. En 1797 des campagnes électorales ont lieues, à cette occasion on organise des banquets, des bals où Emigrés et déserteurs s'affichent avec des Royalistes armés de pistolets, gourdins ou sabres, arborant ganses blanches. Des Comédiens du Théâtre de Clermont, gagnés à la cause Royale, détournent une partie de leurs répliques pour se moquer des agents publics, alors qu'ils sont censés jouer Tancrède de Voltaire.
Au prix de nombreux combats physiques et argumentaires, d'investissement de la presse et des lieux publics, les idées Royalistes progressent énormément. Mais comme beaucoup de partis de l'époque ils ont recours à la triche pour gagner des élections locales : corruption des électeurs par l'alcool, l'argent ou la menace, persécutions de Républicains, surveillance armée des bureaux de vote par des Contre-Révolutionnaires ou des bandits... A la sortie les Royalistes gagnent 43% des cantons du Puy-de-Dôme et élisent 4 personnes dans les Conseils du Directoire. En fait pour les élections de 1795-1797, beaucoup de majorités sont favorables aux Monarchistes, mais les Révolutionnaires aussi ont recours à la triche et à petits des coups d’Etat pour que la République se maintienne.
Pour fêter ça, ils organisent un grand banquet à Riom le 18 Avril 1797 où ils sont environ 600 personnes, qui se terminera en bagarre avec les Républicains locaux. S'inspirant de la Terreur Blanche Lyonnaise, ils décident qu'il faudra pourfendre les Bleus qui leur ont fait tant de mal ! Ils organisent alors un autre banquet à Montferrand le 23 Avril 1797 après lequel ils attaquent la caserne des volontaires et les Révolutionnaires de Clermont. Plus tard, avec la complicité du Tribunal et des autorités civiles qu'ils ont récemment infiltrées, les Royalistes font désarmer et juger les volontaires Républicains de la ville. Ils arrivent aussi à contrôler la Garde Nationale montée (à cheval), quelques gendarmes et militaires. Ils massacreront les Républicains au Bois de Cros le 9 Juillet 1797, ce qui a pour conséquence d'apeurer tout Clermont et ses alentours, plusieurs partisans de la Révolution quittent la ville avec leurs familles.
Les postes à responsabilité récemment acquis permettent aux Contre-Révolutionnaires de détourner des fonds publics afin de financer leurs soldats et de racheter des Biens Nationaux pour les restituer à leurs anciens possesseurs et aux communautés religieuses. Ils bénéficient aussi de l'argent prit aux Républicains pendant les escarmouches. En Décembre 1798 les Royalistes Auvergnats et Bourbonnais créent l'Agence Royale, afin de préparer des insurrections de grande ampleur ainsi que des opérations militaires. Mais le projet n'aboutira jamais à cause du manque d'organisation et des hésitations de ses chefs.
Début de l’Ere Napoléonienne
Le coup d'état par le Général Bonaparte survient en 1799. Les Compagnons de Jéhu seront condamnés au Puy-en-Velay cette même année. La Contre-Révolution va perdurer jusqu’en 1815, année de la Restauration Monarchique, mais elle va peu à peu s’essouffler et devenir moins intense à cause de la politique de Napoléon. En effet, ce dernier arrive à réprimer plusieurs insurrections, mais surtout va signer un Concordat avec l’Eglise et faire du Catholicisme officiellement la Religion de la majorité des Français, ce qui ne veut pas dire religion d’Etat mais les Catholiques reprennent une place privilégiée dans la société, ce qui les apaise nettement. De même, il va prendre contact avec les Emigrés issus de la Noblesse en leur proposant de revenir en France pour servir dans son armée, et à terme mettre en place une Aristocratie d’Empire. La politique de Napoléon sera couronnée de succès, malheureusement la guerre permanente le pousse à intensifier la Levée en Masse, ce point précis empêche les Auvergnats de décolérer contre son gouvernement. Malgré cela, il y aura beaucoup moins de Chouanneries en Auvergne durant la période Napoléonienne que la période Révolutionnaire.
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