L’Auvergne n’a pas toujours parlé le Français.
Nous ne savons pas grand-chose des langues parlées à l’époque Paléolithique. Au Néolithique non plus d’ailleurs, mais certains supposent que le Basque serait une survivance de l’époque, étant une des rares langues d’Europe de l’Ouest à ne pas être d’origine Indo-Européenne, alors est-ce une langue locale ou un dialecte descendant d’une langue mère plus ancienne commune à ces peuples fermiers venues du Proche-Orient, qui par extension pourrait avoir été parlée en Auvergne ?
Par contre on en sait un peu plus sur les langues Indo-Européennes qui se sont divisées en plusieurs branches, dont une Italo-Celtique qui se divisera elle-même en diverses langues Gauloises, Britonniques, Latines, peut-être aussi Ligures, et bien d'autres.
Durant l’Antiquité notre région était peuplée par les Arvernes, peuple Celtique du Massif Central, qui parlaient une langue Celtique également, de fait. Jules César dit que la plupart des Gaulois se comprenaient entre eux, ainsi qu’avec les Celtes de (Grande) Bretagne. On sait maintenant qu’il ne faut pas prendre ce que racontait le Proconsul à la lettre, mais il est probable que les différentes Tribus parlaient des dialectes apparentés, et que le Celtique Continental puisse être une langue intermédiaire entre le Celtique Insulaire et les langues Latines et/ou Ligures. Dans les premiers siècles de notre ère, les Chrétiens trouvaient que les Galates (Celtes d'Anatolie) parlaient une langue incroyablement proche de celles des Gaulois. Avec la diplomatie et le commerce, de nombreux Celtes parlaient également Latin, voire Grec, ce qui a plus tard facilité la Romanisation des Gaules jusqu’à ce que la langue Latine devienne officielle. On suppose que beaucoup de dialectes Gaulois auraient survécu jusqu’au IVème siècle, surtout dans les zones rurales. Il y a de fortes chances que ces langues n'étaient plus vraiment Celtiques et qu'elles étaient mélangées avec une forme vulgaire de Latin.
Après la chute de l’Empire Romain d’Occident le Latin a lui aussi décliné en plusieurs dialectes populaires, qui ont gardé quelques influences Celtiques, Ibères et Germaniques. Cela dit le Latin reste la langue officielle de l’Eglise Catholique et de la plupart des élites d’Europe de l’Ouest.
Le Français, langue issue du Francilien, une langue d'Oïl, dialecte Latin d’Île-de-France, parlé par la Royauté Franque, ne deviendra la langue administrative officielle du Royaume à la place du Latin qu'en 1539 pendant le règne de François Ier, alors en querelle ouverte contre l’Eglise Romaine. Il ne sera parlé au début que par les couches éduquées de la société, bien qu’il se développe au fil des siècles, le Français ne deviendra la langue unique de la France que sous la IIIème République rendant son apprentissage obligatoire et interdisant l’usage des Patois et dialectes locaux, d’où la célèbre phrase écrite sur les tableaux des salles de classe : "il est interdit de cracher par terre et de parler Patois". Les Bretons étaient un peu mieux vus car leur phrase était personnalisée, le terme Patois étant remplacé par Breton. L’Alsacien sera épargné parce qu’à cette époque sa région est rattachée au IId Empire Allemand.
Aujourd’hui certaines langues locales sont à nouveau enseignées, comme le Breton, l’Occitan, l’Auvergnat et d’autres, mais elles sont en quelques sortes synthétiques. On parle par exemple d’Auvergnat unifié, car initialement, comme dans toutes les autres contrées, il n’y avait pas un Auvergnat commun mais une multitude de dialectes spécifiques à certaines zones, même s’ils ont souvent des points communs.
Souvent l’Auvergnat est classé comme un dialecte issu de l’Occitan. Mais d'après le Linguiste Karl-Heinz Reichel, qui fait partie du Cercle Terre d'Auvergne, les deux langues sont apparues à la même époque et ont évoluées différemment, mais étant des formes vulgarisées (populaires) de Latin du Midi des Gaules on retrouve des similitudes. Le débat autour de ce sujet subsiste. L’Auvergne étant géographiquement située dans la partie centrale de la France, chaque zone reçoit plus ou moins d’influence d’autres régions, on retrouvera des formes plutôt Françaises au Nord, plutôt Provençales au Sud, et globalement divers Patois issus des langues d’Oc, d’Oïl, du Franco-Provençal. Malgré tout on retrouve une forme de syntaxe commune à presque toute la région, à part le Nord de l'Allier qui se rattache au Berrichon. C'est assez drôle, les Bourbonnais sont génétiquement plus proches des Berrichons que des Auvergnats, cliquez ici pour voir la page sur la Génétique des Auvergnats.
Les linguistes ne sont pas toujours d'accord sur comment classer les groupes et dialectes, même les frontières culturelles ne font pas consensus, j'ai pris donc la carte la plus simple à comprendre.
De haut en bas :
- le Bourbonnais et l'Arverno-Bourbonnais. En fait l'Allier se trouve dans le Croissant linguistique où il n'est pas facile de classer certains dialectes qui sont à cheval entre les langues d'Oïl et les langues d'Oc. En gros vous avez au Nord le Bourbonnais, langue d'Oïl issue du Berrichon, au Sud l'Arverno-Bourbonnais, donc à cheval entre le Bourbonnais et l'Auvergnat. On appelle ça parfois de l'Occitan avec une phonétique Francisée. Mais les limites ne sont pas clairment définies ;
- l'Arverno-Limousin, ou Auvergnat Septrional. Il prend environ la moitié de la région et déborde largement sur la Creuse ;
- le Vivaro-Alpin, ou Franco-Provençal, dont fait partie le dialecte Yssingelais et l'Est de l'Arverno-Bourbonnais ;
- l'Arverno-Vellave, ou Auvergnat Médian, qui est donc un dialecte commun au Sud-Est du Puy-de-Dôme et de la majeure partie du Velay, avec la frontière Nord du Cantal et l'Est de la Corrèze ;
- l'Auvergnat Méridional qu'on trouve dans le Nord du Cantal, le Sud du Velay et englobe aussi un bout de la Corrèze, ainsi que le Nord de la Lozère et de l'Ardèche ;
- l'Aurillacois, dialecte Languedocien qu'on trouve au Sud du Cantal.
Des mots Gaulois subsistent pour désigner les objets du quotidien dans ces langues d'Auvergne :
- saïle = manteau de berger ;
- brayes/banne = corne ;
- suc/grun = hauteur ;
- alaude = alouette.
-combraille = vallée
(je ferai certainement une note sur les mots Gaulois qui sont restés ou ont influencé le Français);
Le Patois garde des mots de vieux Français ou d'Occitan, certains étant spécifiques à des métiers précis, mais c’est bien le Français obligatoire qui va éteindre les parlers locaux. On garde tout de même pendant longtemps un accent et des expressions n’étant pas du Français conventionnel, avec inversion du féminin et du masculin comme une lièvre, un dinde ; un objet « fait besoin » signifie qu’il est utile, « plier quelque chose dans du papier (ou autres)» signifie l’envelopper ; le possessif « ça mien », « ça des autres » ; « y pleut »ou « ça pleut » pour dire qu'il pleut ; « ça fait pas rien » signifie que c'est sans importance ; une soune vaut deux sous... Etc
Il existe une littérature en Auvergnat et Occitan à partir du Moyen-Âge jusqu'au début du XXème siècle, mais à part dans quelques cercles de Linguistes et de Musiciens, le parler local a fait place au Français. Il faudra que j'écrive quelques notes sur cette Littérature et sur ce à quoi pouvait bien ressembler l'Auvergnat. Vu que moi-même je ne le parle pas, je me contente pour le moment de vous mettre quelques phrases en vrac que j'ai trouvé à droite à gauche, je vais faire comme si ça venait tout de la même langue, alors que ça peut varier selon les lieux.
Voilà un petit tableau de la prononciation de l'Auvergnat (j'ai un problème avec l'affichage du tableau, j'espère vite le résoudre)
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Sachez aussi que dans un phrase on ne dit généralement pas le pronom du sujet qui effectue l'action (comme en Italien : Je suis = Sono, et pas Io Sono), à l'inverse on met souvent un article devant un prénom (Nicolas = Lo Nicolau).
J'essaie d'écrire les mots phonétiquement mais ce n'est pas facile, n'hésitez pas à me corriger...
Salut : Adieu (tutoiement), Adissiatz (Vouvoiement, se prononce Adyichia)
Bonjour = Bonjorn (se prononce Boundzour)
Au revoir = Arabir
A bientôt = Aminartico (Aminartyicou)
Merci bien = Merces plan (Mèrsè pla)
Ça va ? = Coma va ? (Coma va, como vo)
Ça va bien = Va plan (Va pla)
Quoi de neuf ? = Què de nòu ? (Qué dè nou)
Peut-être = Biau, Bi O (Biow, Biou ?)
C'est cher = Aquò es char (Ako è tsa ?)
On n'est pas d'ici = Sèm pas d'aqui (Sén pa d'aki)
Méfie-toi = Mefia te (Méfia té)
Je suis Auvergnat = Siau Auvernhat (Chiow Owvèrgna)
Auvergne = Auvèrnha (Owvérgna)
Clermont = Clarmont (Clarmon)
Puy de Dôme = Puei-Domat (Puille-Doum ?)
Aurillac = Orlhac (Ourillac)
Source : https://www.eauvergnat.fr/savez-vous-parler-auvergnat
J'en rajouterai à l'occasion mais cette page m'a pris un temps fou...
Article lié : Le Troubadour Cantalien Astorg VII d'Orhlac - La Vergonha : éradication des langues locales - Apprendre l'Auvergnat