Le Temple de Mercure Dumias (13/08/2020)

Situé au sommet du Puy de Dôme, le Temple de Mercure très partiellement reconstruit est visible. Il a été découvert en 1872 sur le chantier de l'actuel observatoire météorologique. Après plusieurs fouilles il ne sera classé monument historique qu'à partir de 1889.

Il s'agit d'un lieu de culte édifié peu de temps après la conquête des Gaules par les Romains. Un premier temple fut construit à cet emplacement en l'an 50, puis détruit vers 150 afin d'édifier le second. Il tombera en progressivement en ruine, on ne sait pas à partir de quand, sachant que le lieu accueille toujours des fidèles jusqu'au Vème siècle. Une église romane sera construite à proximité au XIIème siècle.
A l'heure actuelle on n'a pas connaissance d'un lieu de culte antérieur à cet emplacement, cependant on serait tenté de spéculer sur des cérémonies ayant lieues à l'époque Celtique, et peut-être même avant. Mais le choix de Mercure n'est pas anodin, puisque que d'après Jules César il s'agirait de la Divinité la plus importante en Gaule. Les férus de comparaisons mythologiques l'assimilent donc naturellement au Dieu Celte nommé Lug. Par ailleurs le Mercure du Puy de Dôme est surnommé Mercure Dumias (Mercure du Dôme), Mercurio Arvernoric (Mercure Roy des Arvernes), Mercurio Arverno (Mercure l'Arverne), Arvernorix (Roi des Arvernes).

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Reconstitution supposée du Temple de Mercure Dumias, par Désarménien

On trouve des inscriptions dédiées au Mercure Dumias jusqu'en Allemagne, peut-être laissées par des Arvernes engagés dans les armées de Rome sur le limes.
On sait également que nombre de voyageurs passaient par ce temple afin de prier Mercure de les protéger durant leur périple. Le sommet était accessible par le col de Ceyrat. Aussi des pélerinages en son honneur avaient lieu, notemment de la part d'habitants de la ville de Lugdunum, aujourd'hui appelée Lyon. Il est intéressant de noter que Lugdunum est la forme Latine de Lug Dunon, qui est traduite selon les interprétations : Colline aux Corbeaux, Forteresse de Lug ou Forteresse de Lumière. Il est tentant de conclure que cette dévotion envers le Dieu du Dôme de la part de ce peuple prouverait bien qu'il s'agisse de la même Divinité Gauloise. Pour information les Celtes de la région Lyonnaise étaient les Ségusiaves.

Le premier temple n'a pas laissé de traces, ses matériaux ayant servis à dresser le second. Ce dernier était construit en trachyte (une pierre volcanique locale) sur une terrasse tétragonale d'environ 60 mètres de côté, donc environ 3600m², orienté à l'Est où Augustonemetum (actuelle Clermont-Ferrand) était visible, et inversement le temple était visible d'en bas tout comme la station météorologique l'est aujourd'hui. Les décorations étaient de marbre, de schiste et de bronze.
La construction en elle-même est assez "Romaine", mais le schéma est en partie hérité du Néméton Celtique, il s'agit en quelques sortes d'un Fanum Gallo-Romain. Néméton signifie "Sanctuaire", c'est le lieu où les cérémonies religieuses avaient lieu. C'est une évolution des religions Indo-Européennes archaïques : à la base, on choisit un lieu sacré qui pouvait être un bois ou une hauteur par exemple, on y creuse un trou qui recevra un sacrifice, autour duquel on dénombre un ou plusieurs fossés circulaires ou quadragulaires pour délimiter la zone sainte de la zone profane et un autre pour délimiter le lieu de culte du monde extérieur. En effet seuls les prêtres entrent dans l'enclos sacré, les fidèles restent à l'écart. Avec le temps ce système se modernise en y ajoutant un toit soutenu par des poutres pour protéger le rituel des intempéries, des planches pour recouvrir le puit sacrificiel qui plus tard deviendra la "Cella" (pièce où réside le Dieu vénéré) avec un autel, des terrassements et des murs pour remplacer les fosses.
fanum.jpgLa version Gallo-Romaine devient le Fanum, le schéma basique change peu : soit la construction Celtique est remplacée par une version plus grande utilisant plus de pierres et en y ajoutant une statue du Dieu (car les Druides ne faisaient pas de représentations de leurs Divinités), soit les délimitations étaient carrément remplacées par des murs et la Cella n'était plus visible par les fidèles qui ne pouvaient plus que tourner autour.
Le cas du Temple de Mercure du Dôme est spécifique car d'une part on ne sait pas si un Néméton existait auparavant, et bien que la disposition soit similaire, un grand vestibule à la façon Méditérranéenne faisait office d'entrée comme le Panthéon de Rome.

D'après Pline l'Ancien, une impressionnante statue de Mercure fut sculptée par le Grec Zénodore, du temps du premier Temple de Mercure, assez grande pour être visible des alentours. Mais on a pas retrouvé de traces de ce Dieu, il n'est pour l'instant pas possible de lschemanemeton.gife savoir si cette oeuvre existait ou non.

 

Bien que le culte de Mercure ne soit plus pratiqué durant l'ère Chrétienne, certains mythes racontent qu'au sommet du Puy-de-Dôme des sorcières se réunissaient durant le Solstice d'Eté pour des vénérations diaboliques afin d'invoquer la Poule Noire, le tout dirigé par le Diable avec une tête de bouc (animal lié à Mercure). Serait-ce complètement inventé ou bien la caricature de cérémonies folkloriques ayant bien eu lieues malgré le triomphe de la Sainte Croix ?

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10:40 | Tags : religion, paganisme, lieu de culte, arvernes, archéologie | Lien permanent | Commentaires (0)